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LE COIN BIBLIOGRAPHIQUE

 

 

http://www.leducation-musicale.com/newsletters/breves1016.htm

 

 

Colette MOUREY : Synergies. De l'espace musical à l'espace urbain. Préface de Jean-Claude Decalonne, Addenda de Michel Mourey, Paris, L'HARMATTAN (www.harmattan.fr ), 2016, 190 p., 20 €.

Au sujet de sa nouvelle publication, l'infatigable Colette Mourey a bien voulu nous préciser que « le lien de l'évolution du langage musical aux transformations de l'espace urbain et aux perspectives actuelles de l'architecture citadine est un axe de réflexion très intéressant… ». Depuis de nombreuses années, elle soutient les orchestres d'enfants de « Passeurs d'Art » (quartiers sensibles, hôpitaux, prisons…), estime que « El Sistema à la française pourrait jouer un rôle éducatif prégnant si on arrive à le développer » : tels sont les objectifs de ce livre gravitant autour d'un « espace de temps rendu holistique » et provoquant une « ouverture d'écoute » avec l'invariant structurant une œuvre d'art tributaire de l'intelligence musicale et du son mental (cf. Lettres d'information, mars et juin 2016) dans une démarche globale.

Pour l'auteur, « nous apprenons par et au sein de l'invariant et le géométrisme qui structurent toute une œuvre d'art à penser de façon entière et globalisée à travers un espace mental infiniment élargi — particulièrement à l'altérité » (dernière de couverture). Pour le préfacier, Jean-Claude Decalonne : « l'orchestre inculque le vivre ensemble, dans un groupe, chacun est utile ; la musique est l'apprentissage de la sensibilité, du respect, des consignes et des personnes. » L'idée générale est que l'orchestre est « un outil social », comme le démontrent ces Synergies qui s'appuient sur de nombreux questionnements. La démarche, si dense, traite de nombreux points : « Être et Avoir », « Inspirer et vibrer », « Improviser ou fixer » ; ce dilemme souligne la transition de l'oralité à l'improvisation, puis de l'improvisation à l'écrit, enfin, de la partition d'orchestre au conducteur, tout en dégageant « le rôle civilisateur des mémoires ancestrales » et « la spirale évolutive de l'invention ».

À la question : « Tous solistes ? », Colette Mourey fait observer que les citadins dépassent leur ego (p. 105), participent à un collectif technique et culturel par le biais detrans-significations perceptives et collectives. Ces assertions sont étayées par des exemples empruntés à Dimitri Chostakovitch et Leonard Bernstein… La coopération exerce un rôle fondateur, tributaire du mutualisme et débouche sur la conscience cosmique. À la question : « Tous chefs d'orchestre ? » (chapitre V), elle traite de la coopération, de la domination de la masse chorale (chœur mixte) ou orchestrale, c'est-à-dire de la redimensionner  et d'élaborer et interpréter l'œuvre musicale dans l'espace-temps pour passer de « l'un au multiple et du multiple à l'un » (p. 128).

Le chapitre VI justifie le sous-titre et le passage du champ urbain au chant du chœur et de l'orchestre. Le chapitre suivant se présente comme une synthèse se rapportant à l'histoire de la musique occidentale. La démarche globale de Colette Mourey, de caractère pluridisciplinaire, fait aussi appel à la psychologie, la philosophie, la sociologie, aux théories de la perception, à l'anthropologie, à la sémiologie et même à la biologie.

Ces éclairages divers  sont judicieusement complétés par Michel Mourey dans l'Addenda  Résonance et cohérence : éléments cachés de la synergie musicale  « supposant une association des moyens afin de renforcer un but commun » (p. 169). En un style percutant et concis, il définit la synergie, le phénomène de la résonance (en liaison avec la consonance et la dissonance), avec de nombreuses précisions (gammes, accords parfaits, hiérarchies des consonances, rapports de fréquences…) permettant de saisir la capacité de perception de la cohérence du langage musical. Une Bibliographie circonstanciée démontre aussi la diversité de cette démarche synergétique. Tant par la multiplicité des questions posées que par l'ampleur de la démarche, ce livre offre une vision globale, un élargissement de l'espace mental englobant l'espace musical et l'espace urbain.

 

 

Édith Weber.

 

Malgré tous nos efforts pour être discursifs, nous raisonnons le plus souvent par « résonance », similarité et assonance : en effet, le substrat sonore complexe, analogique et algorithmique, de notre pensée, s’avère porteur d’un schéma directeur incontournable.

Nous serons, cependant, d’autant plus libres, non asservis à nos images sonores, que nous acquerrons, outre une attention auditive mentale profonde et longuement soutenue, la capacité à réellement conscientiser et analyser toutes ces figures sonores que nous forgeons : utilisant ainsi cette « intelligence musicale » que nous possédons tous et qu’une éducation spécifique développera, si elle est suffisamment réflexive.

Nos sons mentaux coexistent avec la fréquence fondamentale particulière qui signe notre corps physique : une syntonisation harmonieuse et « harmonique », en pleine maîtrise,  nous mène autant à préciser notre identification qu’à atteindre notre plein potentiel.

 

C’est par et au sein de l’élaboration en toute conscience de notre paysage sonore mental que nous devenons à part entière des êtres de création : auteurs des mondes que nous projetons, et dans lesquels nous expérimentons toute la mesure de notre Liberté, par-delà les frontières de tout univers connu et reconnu.

Une fois la source sonore repérée, la perception devient volontariste : on isole l’événement sonore de son contexte pour mieux l’appréhender. Là, l’écoute devient discriminante : ce sont les rapports d’intensité, de durée, de timbre et de fréquence qui sont appréciés et confrontés à l’habitude (la mémoire des événements sonores et musicaux précédemment analysés). 

 


Essai sur le son mental...De résonner...à raisonner !

Malgré tous nos efforts pour être discursifs, nous raisonnons le plus souvent par « résonance », similarité et assonance : en effet, le substrat sonore complexe, analogique et algorithmique, de notre pensée, s’avère porteur d’un schéma directeur incontournable.

Nous serons, cependant, d’autant plus libres, non asservis à nos images sonores, que nous acquerrons, outre une attention auditive mentale profonde et longuement soutenue, la capacité à réellement conscientiser et analyser toutes ces figures sonores que nous forgeons : utilisant ainsi cette « intelligence musicale » que nous possédons tous et qu’une éducation spécifique développera, si elle est suffisamment réflexive.

Nos sons mentaux coexistent avec la fréquence fondamentale particulière qui signe notre corps physique : une syntonisation harmonieuse et « harmonique », en pleine maîtrise,  nous mène autant à préciser notre identification qu’à atteindre notre plein potentiel.

C’est par et au sein de l’élaboration en toute conscience de notre paysage sonore mental que nous devenons à part entière des êtres de création : auteurs des mondes que nous projetons, et dans lesquels nous expérimentons toute la mesure de notre Liberté, par-delà les frontières de tout univers connu et reconnu.

 

 

 

 

L'Intelligence Musicale

Partant du point de vue que l'intelligence musicale est « doublement rationnelle et intuitive » et que « l'audition est à la fois de caractère subjectif et objectif », ColetteMourey, musicologue, enseignante et guitariste, constate que la musique, « proche de l'intelligence linguistique mais aussi de l'esprit scientifique » (p. 54) nécessite une attention « aiguisée, forgée par la volonté » et devant être longuement soutenue.

À l'aide d'exemples musicaux pertinents, de nombreux schémas, d'extraits de partitions et de diagrammes — tout en rappelant que la pensée musicale est abstraite et sollicite l'écoute corporelle globale et que les émotions sont associées à l'intelligence —, l'auteur distingue trois types. Premièrement, l'intelligence rythmique est le fondement des cultures orales (cf. danses primitives, métrique binaire et ternaire aboutissant à l'« a-métrie » dans la musique contemporaine. Elle est tributaire des effets vibratoires et des niveaux de pulsation (battements du cœur, algorithmes), du bipartisme (ouvert/clos) et du tripartisme (A B A'), la musique possède un « potentiel de libération » (p. 27). Deuxièmement, se greffant sur l'intelligence rythmique, l'intelligence mélodique a besoin d'échelles musicales (ou modes). Dans le cas de l'improvisation, le musicien exploite des motifs, peut les orner mais doit respecter l'architecture du mode. Dans le cas de la musique écrite, le compositeur choisit son échelle que l'interprète devra reconnaître. L'auteur rappelle l'évolution historique : modalité et modes d'Église au Moyen Âge ; modalisme (majeur/mineur) entre 1750 et 1820 ; élargissement aboutissant à la polytonalité, à l'atonalité et au dodécaphonisme depuis la fin du XIXe siècle. La hiérarchisation des degrés, le choix des registres (grave, médium, aigu) contribuent à l'expressivité et aux effets de tension à travers la structure de la phrase musicale (exposition, transition, développement) ; elle peut être stable ou modulante. Troisièmement, l'intelligence harmonique, connaissant un développement assez complexe dans la musique occidentale, est une « combinatoire scientifique » entre harmonie et contrepoint, faisant appel à une voix principale et des contrechants, alors que l'harmonie — tout en tenant compte de la mélodie — peut exploiter des basses fonctionnelles et des accords arpégés. L'orchestration fournit les coloris et les timbres. L'audition et la perception polyphonique sollicitent la pensée, l'émotion, le geste et exigent une concentration soutenue. La perception, à la fois conceptuelle et analytique, deviendra écoute, appellera la discrimination, aboutira à la découverte du monde et incitera à un retour sur soi.

Telles sont — allant pour l'essentiel au plus près des propres termes et définitions de l'auteur — les principales orientations de cette publication, résultant d'une vaste expérience, d'un solide sens de l'observation et de la discussion. Colette Mourey s'appuie en partie sur les travaux de Howard Gardner (1983) à propos des intelligences multiples. Elle a le mérite de prolonger les théories de la perception lancées vers 1960 par Robert Francès, puis Michel Imberty, Arlette Zenatti… et démontre à quel point ces trois types d'intelligence musicale associés à une perception volontariste sont complémentaires et imbriqués. En fait, cette publication des Éditions Marc Reift n'est qu'un commencement, et l'auteur annonce d'autres parutions. 

Edith Weber


Il est, pour nous, d’une impérieuse nécessité de reprendre contact avec notre « Son », cette vibration fondamentale complexe qui « signe » tout notre être, et qui, seule, nous permettra d’ancrer « harmoniquement » et harmonieusement toutes les péripéties de notre existence.

 

Constamment, l’audition tend à l’ « entendement », nous conduisant vers une dimension plus élevée, dans une spirale ascendante analogue à l’Expansion Universelle : microcosmes très précisément  « signés » au sein d’un macrocosme dont la très forte identité est similaire à la nôtre, acteurs tout autant que spectateurs dans l’hologramme que nous façonnons comme il nous remodèle, nous sommes, chacun, l’Unité vers laquelle converge cette apparente multiplicité, et l’un des Multiples vers lequel tend l’Unité primordiale.